On ne s’étonne plus que des personnalités publiques parlent ouvertement de leurs maladies

Les maladies ne sont pas un sujet privilégié de narration. En effet, on pouvait dire que jusqu’à il n’y a pas si longtemps il a été jugé inapproprié de les rendre publics. Au moins jusqu’à ce que les paroles de condoléances sanctionnent l’inévitable prévalence du «maladie incurable» ou marquait la fin d’un «longue bataille». Nous en parlons au passé, car le scénario social actuel est différent. Aujourd’hui la confrontation avec la maladie a tendance à être vécue en public et d’en faire un récit. Il existe d’innombrables récits qui remontent à un genre littéraire qui en anglais a reçu le nom de rapport de misère. À la fin misère le sens de doit être attribué malheur, souffrance, tourment; en italien on pourrait appeler ces récits «histoires de douleur». Nous ne sommes pas surpris que d’éminentes personnalités publiques communiquent ouvertement qu’elles ont entamé un voyage pour combattre une pathologie grave.

Ils ont récemment bénéficié d’une couverture journalistique importante les déclarations en ce sens de Michela Murgia et Alessandro Baricco. Plus significatif encore est que l’une de ces histoires de douleur, où la maladie mortelle de l’auteur et les soins requis par sa fille, atteinte d’un très grave traumatisme crânien depuis sa naissance, se mêlent à un prestigieux prix littéraire. On parle de
Comme l’aird’Ada D’Amico, consacré par le prix Strega
. La médecine narrative, qui promeut les récits de douleur, peut considérer cela comme une reconnaissance officielle de sa pertinence. Les nombreuses personnes qui – dans un volume, avec un post, avec un échange sur un site social – donnent voix à leur histoire de douleur ne le font pas dans un but littéraire : ils répondent plutôt à un besoin profond. S’il est vrai, comme le dit l’écrivain Flannery O’Connor, que «La maladie est un endroit où personne ne peut t’accompagner», il n’en demeure pas moins que cet événement peut être raconté. Et que l’histoire peut avoir un impact bénéfique sur ceux qui la racontent et sur ceux qui l’écoutent, en acquérant une valeur thérapeutique.

Ce n’est pas tout ce que nous attendons de la narration en médecine. Comme le propose le document, né d’une conférence de consensus promue par l’Istituto Superiore di Sanità (Lignes directrices pour l’utilisation de la médecine narrative dans le domaine de l’assistance clinique), la « compétence communicative » qui permet « d’acquérir, de comprendre, d’intégrer les différents points de vue des acteurs impliqués dans la maladie et dans le processus de traitement » devrait être une exigence pour tout professionnel de la santé. Nous sommes aux antipodes d’une médecine efficace, mais touchés par une sorte de sourd-mutisme, que l’on rencontre souvent dans la pratique. Le document ISS a été proposé en 2014. Quels efforts ont été déployés au cours de la dernière décennie pour la compétence communicative des professionnels de soins pas un vœu pieux, mais une réalité quotidienne ?

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