Si les institutions approuvent de nouveaux médicaments efficaces et coûteux pour les cancers, il devrait en être de même en ce qui concerne les voies de traitement du DCA
Ma fille de 17 ans est tombée malade d’anorexie. J’ai lu que certains lits dédiés aux patients souffrant de troubles alimentaires ont été démantelés : je suis choquée et incrédule face au moment historique que nous vivons, avec une telle augmentation des enfants et des jeunes malades. Ma fille a dû attendre des mois avant d’avoir accès aux soins et cette période a aggravé son état général. Je me demande pourquoi une telle décision. J’espère vraiment que nous changerons de cap, pour l’avenir de nos enfants.
Il répond Stefano Erzegovesinutritionniste et psychiatre, vulgarisateur scientifique (ALLER AU FORUM)
Grâce aux efforts de gens comme elle, les choses ont changé : les patients atteints troubles alimentaires (Dca)leurs familles et associations ont signalé avec force la situation critique aux hôpitaux et institutions compétents, obtenant la restauration des lits dédié au DCA. Je profite de votre courrier pour pointer une criticité générale dans la prise en charge de ces affections, qui va bien au-delà du cas du seul hôpital et concerne l’ensemble du territoire national : Les DCA sont des pathologies complexes, qui impliquent d’immenses souffrances pour les patients et leurs familles, nécessitent des traitements longs et coûteux et sont bien loin des préjugés des caprices d’adolescents fortunés, en vogue il y a encore une décennie et qui, aujourd’hui encore, peinent à quitter l’esprit de certains. C’est pourquoi je continue, depuis des années, la comparaison entre le DCA et les pathologies oncologiques: dans les deux cas, ce sont des maladies complexes, avec des causes multifactorielles, des besoins de soins élevés, une mortalité élevée et un impact énorme sur la qualité de vie des personnes qui en souffrent.
Si les institutions, à juste titre, ne sourcillent pas lorsqu’il s’agit d’approuver de nouveaux traitements efficaces et coûteux pour les maladies oncologiques, il devrait en être de même lorsqu’il s’agit de valider les parcours de soins longs et complexes dédiés au DCA. Qu’entend-on par parcours de soins longs et complexes ? Ce sont des itinéraires, accessibles à tous les citoyens, avec des équipes professionnelles – au minimum un médecin, un nutritionniste et un psychologue – qui, de manière ponctuelle et coordonnée, prennent en charge les personnes atteintes de DCA et leurs familles, dès les premiers symptômes. J’ai délibérément mentionné l’implication des familles parce que la faute des familles comme cause du DCA est l’autre grand préjugé qui, encore aujourd’hui, enivre l’esprit de beaucoup. Non seulement les familles ne sont pas une cause de DCA, mais elles représentent, en particulier pour les jeunes, une ressource nécessaire pour la thérapiequi doit être informé de manière adéquate et immédiatement impliqué dans le processus de traitement.
Je cite un extrait de mon examen, paru dans le Courrier de santé il y a quelques mois (peu de temps après la Journée de l’arc lilas, dédiée précisément à DCA) à propos la nécessité d’un changement radical de perspective dans le traitement: Comme nous l’avons mentionné à plusieurs reprises, les DCA nécessitent des traitements longs, complexes et coûteux, qui impliquent un risque très élevé de mortalité chez les populations jeunes et par ailleurs en bonne santé. Tout comme les maladies oncologiques, le fait que les DCA soient des maladies complexes et coûteuses ne peut et ne doit pas être une raison pour les traiter insuffisamment. Il est nécessaire, maintenant plus que jamais, un réseau de traitements uniformément répartis sur tout le territoire et qui, en complément des cliniques pluridisciplinaires, prévoit des lieux de prise en charge de plus grande intensité (hôpital de jour, hospitalisations dédiées au DCA) pour les formes les plus graves. un engagement est nécessaire de nous toustous les jours, pour que les troubles du comportement alimentaire cessent d’être une fois pour toutes la Cendrillon de la santé.